JARDINS PARTAGÉS

La nature au bord de la route : le cas des jardins partagés de l'agglomération grenobloise.

Responsable scientifique

Grégoire CHELKOFF
gregoire.chelkoff@grenoble.archi.fr

Magali PARIS
parismagali@grenoble.archi.fr
Laboratoire CRESSON, UMR CNRS 1563, Grenoble

Durée de la recherche : 16 mois

Interview

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Résumé

Cette recherche porte sur les jardins familiaux situés en bord d'infrastructures de transport, emblèmes d'un développement urbain fait de juxtapositions qui engendrent des "chocs d'ambiance" remarquables. En interrogeant cette cohabitation inattendue, il s'agit d'évaluer le rôle de ces jardins comme éléments de mitigation des territoires existants et d'envisager leur devenir. En d'autres termes, une conception durable des réseaux routiers et ferroviaires, qui pourraient accueillir une nature de bord de route à vocation sociale et écologique, est-elle envisageable ?

Abordant aussi bien l'échelle territoriale des trames vertes et bleues et l'échelle locale du vécu habitant, des éléments de réponse à cette question sont explorées en croisant, tant d'un point de vue théorique que méthodologique, les connaissances portant sur les ambiances, l'aménagement et l'écologie. Cinq sites de jardins familiaux municipaux ou illicites et 6 délaissés, situés en bord de route et/ou de voie ferrée et souvent liés à des logements sociaux, sont étudiés à travers ces approches sur les communes d'Echirolles et de Saint-Martin-d'Hères (France, département Rhône-Alpes).

À l'échelle des sites de jardins et des délaissés, une méthode pour croiser les critères d'ambiances et écologiques est mise en place afin de questionner et définir des critères d'analyse et de conception. Du point de vue du vécu sensible, des unités d'ambiance de jardins sont mises en évidence à travers des observations ethnographiques, des prises de son accompagnées de mesures indicatives de niveau sonore dans et autour des jardins. Ces unités d'ambiance articulent à la fois des traits du lien social, les morphologies de l'aménagement et certaines qualités sensibles (sonores, lumineuses, climatiques). Sur la parcelle jardinée, les pratiques jardinières et sociales sont mises en relation et leur influence sur la biodiversité est évaluée. D'un point de vue écologique, des inventaires de terrain faune-flore "sauvage" et la caractérisation des formations écosystémiques permettent d'évaluer la contribution favorable des jardins et des délaissés à la biodiversité spécifique locale, certes ordinaire mais néanmoins intéressante.

A plus grande échelle, la fonctionnalité écologique est abordée à partir de cartographies de la trame verte et bleue existante en vue d'évaluer le rôle des jardins et délaissés comme éléments de renforcement de cette trame. Enfin les problématiques croisées ont été mises en débat à travers des rencontres avec des experts (chimistes, écologues, monteurs et gestionnaires de jardins familiaux et partagés, concepteurs d'infrastructures) et avec des acteurs municipaux des communes concernées. Ainsi, sur les délaissés routiers, des scénarii ont été testés afin d'envisager un développement des jardins adoptant la double approche ambiances et écologie.

Nos travaux montrent que ces jardins et ces délaissés participent à dilater en épaisseur les continuités écologiques déjà présentes le long des infrastructures. En termes d'ambiance vécue, ces jardins jouent un rôle non négligeable, créant un univers particulier permettant aux occupants comme aux visiteurs d'échapper momentanément aux nuisances sonores et visuelles de la route et de la voie ferrée.

La collaboration des disciplines du vivant et de l'aménagement nécessite la mise au point de critères adaptés aux espaces de sociabilité et de promenade et aux espaces de nature de pleine terre. Ils constituent un objectif et un moyen pour appréhender ces situations multiformes, complexes et paradoxales et envisager une conception plus soutenable des infrastructures de transports terrestres intégrées au territoire urbain. Toutefois, un certain nombre d'obstacles à l'inscription des jardins en bord d'infrastructures de transport et au sein des trames vertes et sociales apparaissent et demandent encore des investigations scientifiques (notamment en termes de pollution de l'air et des sols) ainsi que la poursuite du dialogue avec les acteurs institutionnels.